Mon ami Federico Aloisi m’a fait parvenir un article paru dans le magazine « Mondo Sommerso » en Février 1976, il s’agit d’un reportage réalisé par Angelo Gadau sur les corailleurs et leurs techniques d’immersion.
J’en ai fait un petit condensé qui, je l’espère, vous permettra de vous « immerger » dans le monde de ces pionniers, 40 ans en arrière …
L’or Rouge, Angelo Gadau
En ce qui concerne les expériences réalisées dans le domaine des travaux sous-marins, les techniques de plongée ont évolué et aujourd’hui , les corailleurs utilisant des mélanges modernes à base d’hélium, ouvrent ainsi une nouvelle voie à la poursuite de leur gagne-pain, même si c’est au prix de graves dangers et d’énormes sacrifices.
En dessous de moi, une fine corde disparait dans le bleu, où tout semble se perdre, dilué dans une semi obscurité qui enlève à l’homme la seule chose qui lui donne la certitude d’être dans le monde : la lumière.
Je suis à une profondeur de 50 mètres, avec mes bouteilles d’air comprimé, et je ne parviens même pas à entrevoir où se situe l’homme qui est allé au fond et duquel les expirations se transforment en une colonne argentée de bulles déjà écrasées, réduites en pluie, éteintes comme un nuage dans le courant.
Ces bulles sont très différentes de celles, que je produis, au-dessus de ma tête.
Lui, là dessous, est en train de piqueter du corail à une profondeur de 120 mètres, depuis déjà 12 minutes. Quand il remontera pour sa décompression, pratiquement à ma position actuelle, je pourrai le photographier. Je lui demanderai avec des gestes si tout va bien, à travers le masque, je tenterai d’évaluer sa lucidité et de lire sa tension.
J’en ai fait un petit condensé qui, je l’espère, vous permettra de vous « immerger » dans le monde de ces pionniers, 40 ans en arrière …
L’or Rouge, Angelo Gadau
En ce qui concerne les expériences réalisées dans le domaine des travaux sous-marins, les techniques de plongée ont évolué et aujourd’hui , les corailleurs utilisant des mélanges modernes à base d’hélium, ouvrent ainsi une nouvelle voie à la poursuite de leur gagne-pain, même si c’est au prix de graves dangers et d’énormes sacrifices.
En dessous de moi, une fine corde disparait dans le bleu, où tout semble se perdre, dilué dans une semi obscurité qui enlève à l’homme la seule chose qui lui donne la certitude d’être dans le monde : la lumière.
Je suis à une profondeur de 50 mètres, avec mes bouteilles d’air comprimé, et je ne parviens même pas à entrevoir où se situe l’homme qui est allé au fond et duquel les expirations se transforment en une colonne argentée de bulles déjà écrasées, réduites en pluie, éteintes comme un nuage dans le courant.
Ces bulles sont très différentes de celles, que je produis, au-dessus de ma tête.
Lui, là dessous, est en train de piqueter du corail à une profondeur de 120 mètres, depuis déjà 12 minutes. Quand il remontera pour sa décompression, pratiquement à ma position actuelle, je pourrai le photographier. Je lui demanderai avec des gestes si tout va bien, à travers le masque, je tenterai d’évaluer sa lucidité et de lire sa tension.
Les minutes s’accumulent, nous en sommes déjà à 20. Je sens que la remontée aura bientôt lieu car le flotteur attaché à une branche de corail vient de me passer à côté, de façon à signaler au collègue qui s’immergera tout de suite après, où il conviendra de commencer le travail. Puis, le fin cordon ombilical entre le fond et la surface me laisse deviner une ombre brune qui se déplace vers le haut, maladroite et gigantesque composée d’une énorme masse de bouteilles. L’ascenseur la remorque vers le haut, assez rapidement, grâce à la poussée des gaz qui se dilatent et qui fuient. L’ascenseur est une boite en plastique blanc sur laquelle a été ouvert un angle afin de permettre l’entrée et la sortie des gaz. L’homme chargé d’outils et de matériel attrape la poignée et se fait tirer vers le haut. La pression diminue, les gaz se dilatent, tout remonte, remonte encore, en accélérant, pendant ce temps l’homme garde les yeux rivés sur son profondimetre, attentif au fait que sa remontée ne soit pas trop rapide et ne devienne pas incontrôlable. Désormais je le distingue parfaitement : pendant un instant j’ai pu entrevoir le reflet de son masque pendant qu’il regardait vers le haut, cherchant le lest et la corde métrée à laquelle s’accrocher, mais surtout la lumière.
Lorsque le corailleur se rapproche, il a l’air d’un être invraisemblable, presque irréel. Le profondimetre indique -54 mètres, un chiffre excellent pour la plupart des plongeurs et c’est ici qu’il entame sa décompression. Je le regarde droit dans les yeux où je pense déceler une perte d’attention, une ivresse : il a les yeux bleus, et tellement vifs que pendant un instant j’ai la sensation que c’est lui qui se préoccupe de moi, m’examinant et se demandant si tout va bien pour moi. Puis ses yeux s’entrouvrent, aux extrémités de sa bouche se dessinent deux plis : l’homme me sourit, tout va bien.
Pour le moment il respire encore le mélange hélium-oxygène. Il se déplace calmement : il accroche le panier pratiquement plein de corail et l’envoie en surface par le biais d’une corde reliée au bateau support. Il consulte d’un geste automatique aussi bien le profondimetre que sa montre, puis il fait un autre petit saut vers la surface. Le temps de la décompression est extrêmement long, je n’ai pas envie de l’attendre dans l’eau et puis je dois recharger mes appareils photo. Je viens juste de remonter à bord du bateau quand son binôme se jette à l’eau, avec le panier alourdi par les pierres et sa monstrueuse forme d’extraterrestre il descend tout droit le long du fil.
Lorsque le corailleur se rapproche, il a l’air d’un être invraisemblable, presque irréel. Le profondimetre indique -54 mètres, un chiffre excellent pour la plupart des plongeurs et c’est ici qu’il entame sa décompression. Je le regarde droit dans les yeux où je pense déceler une perte d’attention, une ivresse : il a les yeux bleus, et tellement vifs que pendant un instant j’ai la sensation que c’est lui qui se préoccupe de moi, m’examinant et se demandant si tout va bien pour moi. Puis ses yeux s’entrouvrent, aux extrémités de sa bouche se dessinent deux plis : l’homme me sourit, tout va bien.
Pour le moment il respire encore le mélange hélium-oxygène. Il se déplace calmement : il accroche le panier pratiquement plein de corail et l’envoie en surface par le biais d’une corde reliée au bateau support. Il consulte d’un geste automatique aussi bien le profondimetre que sa montre, puis il fait un autre petit saut vers la surface. Le temps de la décompression est extrêmement long, je n’ai pas envie de l’attendre dans l’eau et puis je dois recharger mes appareils photo. Je viens juste de remonter à bord du bateau quand son binôme se jette à l’eau, avec le panier alourdi par les pierres et sa monstrueuse forme d’extraterrestre il descend tout droit le long du fil.
Je suis venu ici, à Carloforte, pour voir comment se font les plongées des corailleurs de nos jours. Ces hommes œuvrent au fond en utilisant des techniques d’avant-garde. Ils ont créé une société, Labor-Sub, le siège social étant à Sassari, ce qui va suivre est leur histoire.
Antonio Murru, de Santa Teresa Di Gallura, 35 ans, marié, 3 enfants, 10 ans d’activité. Il vient de la pêche professionnelle, et c’est le chef du groupe sans que cela ne pèse sur le reste des membres. De chef, il a le caractère, l’intelligence et la capacité d’organisation.
Mario Bulciolu, également de Santa Teresa, 35 ans, marié sans enfant. Il a déjà travaillé en binôme avec Murru lors de plongées à l’air. Il a 8 ans d’activité en tant que corailleur. Son caractère calme, surtout dans l’eau, lui confère un rendement hors du commun.
Tore Lai, d’Alghero, vient de la pêche professionnelle, 36 ans, marié, 4 filles. Seulement 5 ans d’activité, mais très doué, il est un peu le motivateur du groupe, physique d’un japonais, cheveux en brosse : un personnage.
Ludovico Picciotto, 39 ans, marié, une fille, 12 ans d’activité, il pêchait déjà auparavant, seul. Napolitain, il est entré dans le groupe mettant à disposition son propre bateau.
Il y en a un autre, Angelo Ibba, d’Alghero, excellent plongeur lui aussi, mais il a actuellement suspendu son activité.
Donc le groupe est composé de 4 plongeurs qui travaillent en binômes. Apres avoir abandonné l’air, privilégiant le mélange gazeux, leur première saison à Alghero s’est terminée avec d’excellents résultats, ils ont ensuite migré vers la zone de Carloforte.
Murru et Bulciolu ont été les premiers à faire le grand saut, ils travaillaient à l’air jusqu’à 100 mètres et plus, mais ils avaient compris qu’aussi profond, à l’air, « on mourrait ». Ils ne pouvaient plus continuer ainsi : ivresse, mouvement lourds, manque de vivacité, coup de marteau sur les mains et le risque de ne plus remonter. C’est pourquoi ils sont allés à la COMEX, à Marseille, une des sociétés les plus importantes au monde en termes de travaux sous-marins à grandes profondeurs, où ils n’ont mis, grâce à leur habileté, qu’une vingtaine de jours pour maitriser la préparation des mélanges Hélium-Oxygène. Ils ont acquis un énorme bagage grâce à des tables déjà au point, fonctionnant jusqu’à 90 mètres : la profondeur prévue comme maximale dans les « cas d’urgence » pour les plongeurs français.
Murru et Bulciolu, Lai et Ibba, de retour au pays se sont installés à Alghero afin d’y expérimenter leur très couteux matériel. Cela dit, à 90 mètres, ils y allaient déjà, à l’air, ils avaient besoin de descendre plus bas. Donc, avec un peu de bonne volonté, une montagne de précautions et une pincée de fantaisie, ils ont retravaillé les tables existantes, les modifiant jusqu’à 125 mètres. Il fallait surtout ne pas se tromper dans le calcul des décompressions, car en ce qui concerne la préparation des mélanges gazeux, ils connaissaient les pourcentages Hélium-Oxygène et pouvaient, grâce à l’énorme mélangeur, préparer des mélanges gazeux pour n’importe quelle profondeur.
Les bouteilles étaient pleines, il fallait désormais les essayer. Tirant au sort, c’était à Tore Lai, peut-être le plus « dur » du groupe, d’expérimenter en mer les théories élaborées à terre. L’homme n’a pas hésité : il a fait tomber son masque sur le visage (telle la visière du casque d’un guerrier médiéval, comme dirait Gianni Roghi), s’est fait glisser dans l’eau, a longé le fil et a commencé à travailler. Profondeur 120 mètres. 15 minutes plus tard, Lai commençait à remonter, à presque 60 mètres, agrippé à la corde qui lui avait été lancée du bateau d’où, les compagnons, impatients, attendaient de savoir comment s’était déroulée l’expérience. La petite ardoise où Tore avait écrit « OK. Aucune gêne, corail magnifique ». Le panier avec le corail était remonté rapidement et pratiquement plein.
Antonio Murru, de Santa Teresa Di Gallura, 35 ans, marié, 3 enfants, 10 ans d’activité. Il vient de la pêche professionnelle, et c’est le chef du groupe sans que cela ne pèse sur le reste des membres. De chef, il a le caractère, l’intelligence et la capacité d’organisation.
Mario Bulciolu, également de Santa Teresa, 35 ans, marié sans enfant. Il a déjà travaillé en binôme avec Murru lors de plongées à l’air. Il a 8 ans d’activité en tant que corailleur. Son caractère calme, surtout dans l’eau, lui confère un rendement hors du commun.
Tore Lai, d’Alghero, vient de la pêche professionnelle, 36 ans, marié, 4 filles. Seulement 5 ans d’activité, mais très doué, il est un peu le motivateur du groupe, physique d’un japonais, cheveux en brosse : un personnage.
Ludovico Picciotto, 39 ans, marié, une fille, 12 ans d’activité, il pêchait déjà auparavant, seul. Napolitain, il est entré dans le groupe mettant à disposition son propre bateau.
Il y en a un autre, Angelo Ibba, d’Alghero, excellent plongeur lui aussi, mais il a actuellement suspendu son activité.
Donc le groupe est composé de 4 plongeurs qui travaillent en binômes. Apres avoir abandonné l’air, privilégiant le mélange gazeux, leur première saison à Alghero s’est terminée avec d’excellents résultats, ils ont ensuite migré vers la zone de Carloforte.
Murru et Bulciolu ont été les premiers à faire le grand saut, ils travaillaient à l’air jusqu’à 100 mètres et plus, mais ils avaient compris qu’aussi profond, à l’air, « on mourrait ». Ils ne pouvaient plus continuer ainsi : ivresse, mouvement lourds, manque de vivacité, coup de marteau sur les mains et le risque de ne plus remonter. C’est pourquoi ils sont allés à la COMEX, à Marseille, une des sociétés les plus importantes au monde en termes de travaux sous-marins à grandes profondeurs, où ils n’ont mis, grâce à leur habileté, qu’une vingtaine de jours pour maitriser la préparation des mélanges Hélium-Oxygène. Ils ont acquis un énorme bagage grâce à des tables déjà au point, fonctionnant jusqu’à 90 mètres : la profondeur prévue comme maximale dans les « cas d’urgence » pour les plongeurs français.
Murru et Bulciolu, Lai et Ibba, de retour au pays se sont installés à Alghero afin d’y expérimenter leur très couteux matériel. Cela dit, à 90 mètres, ils y allaient déjà, à l’air, ils avaient besoin de descendre plus bas. Donc, avec un peu de bonne volonté, une montagne de précautions et une pincée de fantaisie, ils ont retravaillé les tables existantes, les modifiant jusqu’à 125 mètres. Il fallait surtout ne pas se tromper dans le calcul des décompressions, car en ce qui concerne la préparation des mélanges gazeux, ils connaissaient les pourcentages Hélium-Oxygène et pouvaient, grâce à l’énorme mélangeur, préparer des mélanges gazeux pour n’importe quelle profondeur.
Les bouteilles étaient pleines, il fallait désormais les essayer. Tirant au sort, c’était à Tore Lai, peut-être le plus « dur » du groupe, d’expérimenter en mer les théories élaborées à terre. L’homme n’a pas hésité : il a fait tomber son masque sur le visage (telle la visière du casque d’un guerrier médiéval, comme dirait Gianni Roghi), s’est fait glisser dans l’eau, a longé le fil et a commencé à travailler. Profondeur 120 mètres. 15 minutes plus tard, Lai commençait à remonter, à presque 60 mètres, agrippé à la corde qui lui avait été lancée du bateau d’où, les compagnons, impatients, attendaient de savoir comment s’était déroulée l’expérience. La petite ardoise où Tore avait écrit « OK. Aucune gêne, corail magnifique ». Le panier avec le corail était remonté rapidement et pratiquement plein.
Aujourd’hui, cela fait 2 saisons que les 4 amis de Labor-Sub descendent avec leur mélange Hélium-Oxygène faire du corail jusqu’à 125 mètres. Ils ont également exécuté des travaux sous-marins à grandes profondeurs pour la société Enel vers l’ile d’Elba, et d’autres travaux pour Agip. Antonio Murru avec Mario Bulciolu et Tore Lai avec Ludovico Picciotto sont deux binômes formidables.
Je leur demande pourquoi ils se sont décidé à utiliser les mélanges gazeux, Antonio Murru répond aux noms de tous : « pour des motifs de sécurité, plonger à l’air était devenu interdit : on risquait de mourir »
De quoi est composé votre équipement ?
« Il s’agit d’un gros mélangeur, assez encombrant, qui est installé à terre comme tu as pu le voir, une machine complexe mais précise, qui prélève, des packs de bouteilles, l’hélium et l’oxygène. Ces packs, comme le mélangeur et le compresseur, nous ont été fournis par la COMEX. Les deux gaz prélevés sont ensuite mélangés en pourcentage défini par l’opérateur selon la profondeur d’action des plongeurs. Le mélangeur emmagasine lentement les deux gaz et les retient.
La phase de décantation entre le mélangeur et les bouteilles s’effectue lentement et l’opérateur doit rester très attentif afin de laisser aux deux gaz le temps de s’unir (il est un peu laborieux de faire entrer l’hélium dans le mélange) sans réchauffement ni fluctuation de pression. A cette étape, pour porter le mélange jusqu’ à la pression de l’exercice, il faut utiliser le compresseur qui comprime les gaz dans les bouteilles, dépassant les 200 atmosphères. Il s’agit d’une opération, qui évidemment, se déroule en circuit fermé, et l’appareil est lubrifié grâce à des huiles spéciales qui coutent à peu près 150000 Lire le KG (75€). Cette opération est, elle aussi, longue est doit être exécutée en respectant différentes phases successives. Lorsque nous rentrons de plongée, nous rechargeons immédiatement notre équipement. Le tout nous a couté pratiquement 60 Millions de Lire (30000€) mais nous ne sommes pas déçus, grâce à notre première saison a Alghero, nous avons récupéré notre mise, et ce, sans aucun incident. »
Je leur demande pourquoi ils se sont décidé à utiliser les mélanges gazeux, Antonio Murru répond aux noms de tous : « pour des motifs de sécurité, plonger à l’air était devenu interdit : on risquait de mourir »
De quoi est composé votre équipement ?
« Il s’agit d’un gros mélangeur, assez encombrant, qui est installé à terre comme tu as pu le voir, une machine complexe mais précise, qui prélève, des packs de bouteilles, l’hélium et l’oxygène. Ces packs, comme le mélangeur et le compresseur, nous ont été fournis par la COMEX. Les deux gaz prélevés sont ensuite mélangés en pourcentage défini par l’opérateur selon la profondeur d’action des plongeurs. Le mélangeur emmagasine lentement les deux gaz et les retient.
La phase de décantation entre le mélangeur et les bouteilles s’effectue lentement et l’opérateur doit rester très attentif afin de laisser aux deux gaz le temps de s’unir (il est un peu laborieux de faire entrer l’hélium dans le mélange) sans réchauffement ni fluctuation de pression. A cette étape, pour porter le mélange jusqu’ à la pression de l’exercice, il faut utiliser le compresseur qui comprime les gaz dans les bouteilles, dépassant les 200 atmosphères. Il s’agit d’une opération, qui évidemment, se déroule en circuit fermé, et l’appareil est lubrifié grâce à des huiles spéciales qui coutent à peu près 150000 Lire le KG (75€). Cette opération est, elle aussi, longue est doit être exécutée en respectant différentes phases successives. Lorsque nous rentrons de plongée, nous rechargeons immédiatement notre équipement. Le tout nous a couté pratiquement 60 Millions de Lire (30000€) mais nous ne sommes pas déçus, grâce à notre première saison a Alghero, nous avons récupéré notre mise, et ce, sans aucun incident. »
Je lui demande de me décrire le matériel de plongée.
« Comme tu as vu, nous utilisons un dispositif formé de 5 bouteilles, il y en a 3 de 14 litres chacune reliées en série, avec doubles attaches et doubles distributeurs, ces bouteilles contiennent le mélange oxygène-hélium et nous permettent d’évoluer au fond en toute tranquillité, avec pour autonomie une vingtaine de minutes à -120/125 mètres. Derrière ce groupe, sont insérées deux autres bouteilles, unies, de 7 litres chacune à 200 ATM, chargée d’air comprimé. Sur ce groupe également il y a un distributeur et nous l’utilisons pour la décompression jusqu’au changement des bouteilles en mer. Le poids total de ce dispositif est d’environ 75 KG, les combinaisons mesurent 10mm d’épaisseur, elles sont françaises et un peu dures, nous devons les remplacer. Comme profondimetre, nous utilisons le modèle Helium de la société SOS basée à Torino, comme montre : ROLEX. Nos masques et nos palmes sont Italiens. »
Combien vous coute une plongée ?
« Entre les gaz et les diverses opérations, autour des 30-35000 Lire (15€) uniquement pour le mélange contenu dans notre appareillage. »
« Comme tu as vu, nous utilisons un dispositif formé de 5 bouteilles, il y en a 3 de 14 litres chacune reliées en série, avec doubles attaches et doubles distributeurs, ces bouteilles contiennent le mélange oxygène-hélium et nous permettent d’évoluer au fond en toute tranquillité, avec pour autonomie une vingtaine de minutes à -120/125 mètres. Derrière ce groupe, sont insérées deux autres bouteilles, unies, de 7 litres chacune à 200 ATM, chargée d’air comprimé. Sur ce groupe également il y a un distributeur et nous l’utilisons pour la décompression jusqu’au changement des bouteilles en mer. Le poids total de ce dispositif est d’environ 75 KG, les combinaisons mesurent 10mm d’épaisseur, elles sont françaises et un peu dures, nous devons les remplacer. Comme profondimetre, nous utilisons le modèle Helium de la société SOS basée à Torino, comme montre : ROLEX. Nos masques et nos palmes sont Italiens. »
Combien vous coute une plongée ?
« Entre les gaz et les diverses opérations, autour des 30-35000 Lire (15€) uniquement pour le mélange contenu dans notre appareillage. »
La journée de ces hommes est pleine et pratiquement sans pause, lorsqu’ils arrivent au niveau du repère en mer, laissé le jour précèdent, le premier corailleur est déjà prêt à plonger. Autour du cou il a une petite corde munie d’un crochet pour soutenir le panier rempli des plombs qui augmentent la profondeur et la vitesse de la descente. Au fond, il le vide et le travail débute : 15 à 20 minutes vraiment « pleines ». Au moment de remonter, il indique sur le fil, un point de repère à son collègue afin que celui-ci puisse continuer le travail à l’endroit exact où il s’est arrêté, puis, à l’aide de « l’ascenseur », le chemin vers la surface débute. Le marin sur le bateau support récupère le flotteur le long du fil, y attache une bouteille en plastique et s’occupe de l’homme qui est en train de faire sa décompression. Il lui envoie une corde avec un plomb, et dès qu’il le sent accroché, lui envoie une autre ligne afin que le plongeur y accroche le panier rempli de corail qui sera immédiatement récupéré. Ensuite, c’est l’ardoise qui arrive au niveau du plongeur, sur laquelle celui-ci devra faire part de ses observations : si le collègue doit descendre, s’il y a suffisamment de corail pour faire une autre plongée, s’il faut aller à droite ou à gauche ect. C’est alors que part le deuxième corailleur, à la fin, à des profondeurs différentes, ils seront tous deux en phase de décompression, c’est le pire moment, celui de l’ennui, de la patience et de la souffrance, si entre temps la mer s’est levée, la décompression peut durer, selon le temps de travail et la profondeur atteinte, jusqu’à 3 heures et demies.
Avec le mélange, la remontée est lente, précise, méticuleuse, malheur à celui qui commet une erreur. Quand l’air du premier groupe est épuisé, le marin envoie une autre bouteille d’air comprimé ainsi qu’une ceinture de plomb. Les deux plongeurs, avec des temps décalés, attachent au crochet les pesantes bouteilles, désormais vides et les envoient en surface, ils se munissent de la ceinture de plomb et vident également les secondes bouteilles. A ce stade, ils arrivent à 12 mètres de profondeur où ils trouvent un narghilé connecté directement à de grosses bouteilles d’oxygène sur le bateau, ils se réchauffent grâce à un autre tuyau, dans lequel arrive de l’eau tiède, qu’ils enfilent sous leur combinaison : une idée simple mais ingénieuse.
La seconde étape de ma « route du corail » m’a porté à Santa Teresa Di Gallura où œuvrent divers corailleurs et ce, jusqu’aux bouches de Bonifacio. Voilà les hommes : Claudio Beux et Gino Bagliano sur leur bateau Ademaro, Fausto Zoboli et Bruno Pietrangeli avec leur bateau Coral Diver, Costantino Oggiano et Giovanni Ascione avec leur bateau Bracco, Paolo Peraccini et Giuseppe Busso avec leur bateau Giovanni, Mario Brunetto ect … Ce sont ceux que l’on nomme les « Teresini » (ceux de Santa Teresa), ils vivent ici et plongent à 10, 15, 20 miles de Santa Teresa.
Dans un premier temps, les « Teresini » ont critiqué l’initiative du groupe de Labor-Sub à cause de la somme dépensée pour acquérir le couteux et novateur équipement, mais lorsqu’ils ont su que les « 4 de la COMEX » avaient fait une saison extraordinaire, tant au niveau de la sécurité que du rendement à grande profondeur, ils ont voulu eux aussi s’engager dans la voie de la plongée aux mélanges gazeux.
Claudio Beux, un jeune intelligent et volontaire, a tout de suite compris qu’il était nécessaire de passer aux nouvelles techniques, dans un milieu comme celui des corailleurs, il ne faut pas trainer et il faut vivre avec son temps. Apres plusieurs recherches, Beux s’est mis en contact avec la société Drass de Fiumicino, une autre entreprise connue dans les travaux sous-marins, qui a fourni les indications avec lesquelles établir les tables de plongée à l’Hélium-oxygène. Tous les corailleurs de Santa Teresa ont répondu présent à cette initiative, se cotisant pour faire face aux dépenses permettant d’acquérir le nouveau matériel (pratiquement une vingtaine de millions de Lire). Le mélange est vendu déjà prêt à l’emploi, il permet d’atteindre 120 mètres. Le pack est composé de 20 énormes bouteilles de 80 litres chacune à une pression de 200 ATM, capables d’être rechargées 35 fois, son prix avoisine 1.2 Millions de Lire, ce qui porte le cout de l’immersion à 60000 Lire. La différence avec le plus couteux équipement de Labor-Sub étant qu’ici, le mélange d’oxygène est fixe à 10% et il ne peut être modifié qu’en utilisant un autre pack.
Beux s’en est remis à Scubapro pour faire construire un nouvel ensemble. En un temps record, la société a fourni aux corailleurs Teresini un penta-bouteilles de presque 72 KG, il est composé de 2 bouteilles de 15 litres connectées entre elles, contenant le mélange pour la respirer au fond, derrière il y a 3 bouteilles de 10 litres (celle du centre remplie du mélange et faisant office de réserve dispose d’un détendeur, les deux autres remplie d’air comprimé à 250 ATM disposant aussi d’un détendeur). Les Teresini ont eux aussi un compresseur à circuit fermé qui porte le mélange jusqu’à 220 ATM.
Le travail effectué par le binôme Beux-Bagliani avoisine les 10 minutes sur le fond, avec une décompression de presque 2h40. Les plus actifs à part Beux sont Pietrangeli et Zoboli, le « vieux » Fausto retourne travailler en mer avec un enthousiasme tel qu’il en rend jaloux les plus jeunes. Avec un bagage considérable et son expérience, il se retrouve à travailler en toute lucidité après tant d’ivresses lors de ses plongées à l’air.
Moins enclins à utiliser les mélanges (bien qu’en appréciant les considérables avantages, ils les estiment chers) Oggiano et Ascione continuent à plonger à l’air. Durant cette saison ils ont travaillé et ont fait beaucoup de profits, étant donné qu’ils sortent en mer quelque soit le temps et réalisent 2 plongées au lieu d’une, comme il est, pour le moment permis, lorsqu'on utilise mélange.
Hajanti et Bencini ont fait la saison a Carloforte, ils plongent toujours à l’air, ce sont pratiquement les seuls à travailler le corail dans les eaux Sardes à des profondeurs, jusqu’ici , considérées comme impossibles.
J’ai parlé avec tous ces gens, cherchant à savoir ce qu’il pouvait se cacher derrière les mots, j’en ai déduit que désormais, la plongée profonde a trouvé sa nouvelle voie. Ces hommes l’empruntent avec attention, scrupuleusement mais aussi, peut-être, avec un zest d’inconscience.
Dans un premier temps, les « Teresini » ont critiqué l’initiative du groupe de Labor-Sub à cause de la somme dépensée pour acquérir le couteux et novateur équipement, mais lorsqu’ils ont su que les « 4 de la COMEX » avaient fait une saison extraordinaire, tant au niveau de la sécurité que du rendement à grande profondeur, ils ont voulu eux aussi s’engager dans la voie de la plongée aux mélanges gazeux.
Claudio Beux, un jeune intelligent et volontaire, a tout de suite compris qu’il était nécessaire de passer aux nouvelles techniques, dans un milieu comme celui des corailleurs, il ne faut pas trainer et il faut vivre avec son temps. Apres plusieurs recherches, Beux s’est mis en contact avec la société Drass de Fiumicino, une autre entreprise connue dans les travaux sous-marins, qui a fourni les indications avec lesquelles établir les tables de plongée à l’Hélium-oxygène. Tous les corailleurs de Santa Teresa ont répondu présent à cette initiative, se cotisant pour faire face aux dépenses permettant d’acquérir le nouveau matériel (pratiquement une vingtaine de millions de Lire). Le mélange est vendu déjà prêt à l’emploi, il permet d’atteindre 120 mètres. Le pack est composé de 20 énormes bouteilles de 80 litres chacune à une pression de 200 ATM, capables d’être rechargées 35 fois, son prix avoisine 1.2 Millions de Lire, ce qui porte le cout de l’immersion à 60000 Lire. La différence avec le plus couteux équipement de Labor-Sub étant qu’ici, le mélange d’oxygène est fixe à 10% et il ne peut être modifié qu’en utilisant un autre pack.
Beux s’en est remis à Scubapro pour faire construire un nouvel ensemble. En un temps record, la société a fourni aux corailleurs Teresini un penta-bouteilles de presque 72 KG, il est composé de 2 bouteilles de 15 litres connectées entre elles, contenant le mélange pour la respirer au fond, derrière il y a 3 bouteilles de 10 litres (celle du centre remplie du mélange et faisant office de réserve dispose d’un détendeur, les deux autres remplie d’air comprimé à 250 ATM disposant aussi d’un détendeur). Les Teresini ont eux aussi un compresseur à circuit fermé qui porte le mélange jusqu’à 220 ATM.
Le travail effectué par le binôme Beux-Bagliani avoisine les 10 minutes sur le fond, avec une décompression de presque 2h40. Les plus actifs à part Beux sont Pietrangeli et Zoboli, le « vieux » Fausto retourne travailler en mer avec un enthousiasme tel qu’il en rend jaloux les plus jeunes. Avec un bagage considérable et son expérience, il se retrouve à travailler en toute lucidité après tant d’ivresses lors de ses plongées à l’air.
Moins enclins à utiliser les mélanges (bien qu’en appréciant les considérables avantages, ils les estiment chers) Oggiano et Ascione continuent à plonger à l’air. Durant cette saison ils ont travaillé et ont fait beaucoup de profits, étant donné qu’ils sortent en mer quelque soit le temps et réalisent 2 plongées au lieu d’une, comme il est, pour le moment permis, lorsqu'on utilise mélange.
Hajanti et Bencini ont fait la saison a Carloforte, ils plongent toujours à l’air, ce sont pratiquement les seuls à travailler le corail dans les eaux Sardes à des profondeurs, jusqu’ici , considérées comme impossibles.
J’ai parlé avec tous ces gens, cherchant à savoir ce qu’il pouvait se cacher derrière les mots, j’en ai déduit que désormais, la plongée profonde a trouvé sa nouvelle voie. Ces hommes l’empruntent avec attention, scrupuleusement mais aussi, peut-être, avec un zest d’inconscience.
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Cet article date d’une époque où la plongée à l’Héliox était pratiquement inconnue du grand public et encore au stade expérimental, la plupart des tables de décompressions étaient encore en train d’être élaborées, les instruments électroniques n’existaient pas, les plongeurs ne pouvaient alors se fier qu’à leur profondimetres et leurs montres, voilà pourquoi une grande majorité choisissait ce qu’il se faisait de mieux, mais ça ne suffisait pas, il fallait également avoir du courage et le gout de l’aventure. En parlant avec des corailleurs encore en activité aujourd’hui (équipés du meilleur matériel et des technologies les plus abouties comme le caisson hyperbare embarqué à bord…) je me suis vite rendu compte, que pour eux, chaque plongée pourrait être la dernière, ils le savent et leurs familles aussi, c’est en pensant à tous ces hommes et à ceux (trop nombreux) qui sont disparus que j’ai voulu vous faire profiter de cet article, j’ai essayé d’être le plus clair possible, j’espère que ça a été le cas.